Mesdames les Conseillères administratives, Monsieur le président du Conseil municipal, Mesdames les conseillères municipales, Messieurs les conseillers municipaux, Chères Carougeoises et chers Carougeois, Chères et chers amis,

Je suis très honorée et heureuse de célébrer avec vous ce soir notre attachement à la Suisse et le bonheur de vivre à Carouge.

Après deux ans sans vraie fête du 1er Août, pandémie oblige, il fait si bon nous retrouver sur l’esplanade du magnifique nouveau théâtre et dans cette très belle Salle des fêtes rénovée et cela sans restriction pour chanter, jouer, rire et se divertir. Il est donc normal que nos premières pensées soient pour l’aspect festif et les retrouvailles liées à notre Fête nationale.

Mais le 1er Août, c’est surtout l’occasion de s’interroger sur les liens que l’on entretient avec sa nation, son pays et son identité, hier comme aujourd’hui.

C’est s’interroger sur ce qui fait le« bien vivre ensemble», et sur le sentiment d’appartenance. Il s’agit avant tout d’un sentiment personnel et évolutif lié à la façon dont chaque citoyenne et chaque citoyen intériorise des repères identitaires, pensons à la langue, la religion, un vécu commun, la culture [ah ! l’importance de la cuisine dans le sentiment d’appartenance ! Je suis certaine que vous avez déjà participé au débat sur le Roestigraben avec pommes de terre crues ou pommes de terre cuites.]

Et en dépit des tentatives souvent poussées au paroxysme de certains de définir des identités nationales uniques et figées, les identités nationales, sont bien évolutives et plurielles. D’ailleurs, pour les Waldstatten en 1291, cette identité visait une alliance et une entraide qui ne faisait pas référence à la création d’un pays avec un seul peuple ou une seule culture. L’idée était de s’unir pour assurer sécurité et bien 

être avec comme base la volonté de construire un destin commun. La diversité était déjà vue comme une opportunité. Aujourd’hui, quand on pense à la Suisse, ce sont souvent des images relatives [et ce n’est pas un cliché] à la beauté de nos montagnes, de nos lacs et des paysages qui viennent à l’esprit. On pense aussi à la force et à la stabilité de nos institutions, à un bon niveau de sécurité, à une sérénité et à une prospérité qui, globalement, ont permis la mise en place d’une protection sociale parmi les meilleures au monde.

Mais il faut se rappeler que la spécificité de notre pays [et son évolution] trouve son origine dans les valeurs basées sur la tolérance, le respect des minorités, le pluralisme, une certaine générosité et la capacité d’innovation, valeurs qui ont toutes permis que la Suisse soit ce qu’elle est aujourd’hui. En réfléchissant à notre histoire et à ces valeurs, il est tout à fait normal d’avoir un sentiment de reconnaissance envers celles et ceux qui l’ont bâti, et de fierté de contribuer à la poursuite de son évolution.

Et parmi eux, j’aimerais saluer aussi les nombreuses migrantes et les nombreux migrants qui, au cours des derniers siècles sont venus en Suisse, quelquefois dans de conditions très difficiles, pour contribuer à la prospérité et à la diversité de notre pays en y apportant leurs compétences, leurs forces et leurs idées.

A Carouge, ces valeurs d’ouverture, de solidarité, de respect et d’accueil ont toujours été ancrées dans notre histoire et dans notre quotidien.

Nous en avons eu encore une fois une preuve éclatante dans la très forte mobilisation de la population pour l’accueil des personnes fuyant la guerre en Ukraine, tant au niveau individuel qu’associatif, et j’aimerais ici citer le club de Waterpolo de notre ville qui a organisé l’arrivée de jeunes sportifs, accompagnés de leurs mères, voire de leur grands-parents.

Aujourd’hui, dans la torpeur ou plutôt la canicule estivale, l’écho de la guerre en Ukraine paraît, parfois, déjà un peu plus lointain. Et pourtant les souffrances sont toujours les mêmes, les combats et les destructions se poursuivent, des personnes continuent de fuir, sont blessées, meurent. Mais aussi, des vies se reconstruisent. Solidarité et espoir doivent prévaloir.

C’est pourquoi j’ai proposé à un groupe de jeunes femmes ukrainiennes, qui ont trouvé accueil et répit dans notre pays, en l’occurrence en Valais et à Carouge même, et qui ont créé deux petites chorales, de participer à notre Fête nationale afin qu’elles partagent avec nous quelques chants qui, s’ils expriment parfois de la mélancolie, parlent surtout d’espoir et de la joie de pouvoir chanter et vivre. Elles vont se produire ici après le cantique suisse. De tout coeur je souhaite les remercier d’avoir accepté d’être avec nous ce soir!

Comme je le disais, célébrer le 1er Août c’est rappeler et interpeller l’histoire, mais c’est aussi l’occasion d’aborder les grands enjeux contemporains. Aujourd’hui, en tant que citoyennes et citoyens, en tant que responsables politiques, l’expression« penser globalement et agir localement» [elle paraît dans le rapport des Nations Unies« Nous n’avons qu’une Terre » en 1972 déjà] doit fonder toutes nos réflexions et nos actes. La réorientation de nos modes de vie de manière à ce qu’ils soient durables n’est ni une mode ni une lubie, mais une nécessité vitale et une urgence reconnue [l’urgence climatique a d’ailleurs été votée aussi par le Conseil municipal de Carouge]. Aujourd’hui, en effet, il n’y a hélas plus beaucoup de place pour une certaine insouciance à laquelle, surtout après deux ans de pandémie, nous souhaiterions pourtant toutes et tous aspirer.

Au niveau mondial, le dérèglement climatique induit par nos modes de vie basés sur les ressources fossiles et une croissance continue provoque des phénomènes météorologiques de plus en plus fréquents et extrêmes, dont les canicules ne sont qu’une des manifestations. Les inondations sévissent dans certains pays, d’autres subissent une sécheresse historique, les incendies se succèdent, les rivières sont au plus bas, les glaciers poursuivent leur fonte rapide, voire disparaissent. Autre face d’une même médaille : la perte inquiétante de biodiversité.

Le déséquilibre environnemental, la crise énergétique, mais aussi la concentration des richesses et l’augmentation de la précarité, et désormais la guerre, si proche, doivent nous interpeller et nous inciter à revoir certaines habitudes et proposer des réponses concrètes. Car les réactions de repli et d’attentisme ne sauraient en aucun cas constituer des réponses aux enjeux socioéconomiques contemporains et encore moins aux enJeux environnementaux.

Face à ces défis qui d’une manière ou d’une autre nous affectent tous, la seule voie possible est celle du courage et de l’engagement. Sans doute les changements nécessaires sont difficiles à appréhender, car les problèmes soulevés sont énormes et, surtout, requièrent une évolution rapide.

Parler de tout cela n’est pas, « faire preuve de catastrophisme ou de pessimisme à outrance». Il s’agit au contraire de prendre conscience des enjeux et de croire que nous pouvons avoir le courage et la force d’agir, chacune et chacun. C’est croire que les valeurs de solidarité, de respect, de responsabilité individuelle et collective, d’innovation, de créativité et de partage qui ont grandement contribué à ce que nous sommes et à ce que nous fêtons ce 1er Août, sauront orienter notre futur et, surtout, contribuer à un avenir plus serein pour les jeunes d’aujourd’hui et de demain ici et ailleurs.

Nous devons, ensemble, construire une ville décarbonée et résiliente. Vivre de manière plus sobre ne signifie pas forcément vivre moins bien, cela signifie déjà ne pas gaspiller, renoncer au superflu. Selon l’Office fédérale de l’Energie en Suisse, il est d’ailleurs possible, par exemple, de réduire de 43% la consommation d’énergie sans diminuer le confort.

A Carouge, nous avons plutôt l’habitude de regarder l’avenir avec détermination et confiance [et avec, permettez-moi de le souligner, un sens aige de la critique ce qui est très positif à mes yeux]. Car si notre ville est renommée pour sa qualité de vie, c’est aussi grâce à son tissu social et associatif forts, parce que les Carougeoises et les Carougeois n’ont pas pour habitude de baisser les bras devant les difficultés. Notre ville participe non seulement activement à la recherche de solutions globales, mais est aussi précurseuse dans l’application de projets concrets visant à améliorer notre quotidien et celui des générations futures.

C’est ainsi que nous nous sommes engagés à diminuer notre empreinte carbone par exemple avec des programmes visant à réduire nos déchets, à consommer moins et mieux, à encourager des échanges économiques plus justes et responsables. L’assainissement énergétique des bâtiments communaux est aussi une priorité.

La nécessité de lutter contre les îlots de chaleurs et d’accroître la végétalisation de la ville me tiennent particulièrement à coeur. Des mesures ont déjà été prises par ex. pour ombrager dans les places de jeux et assurer la présence de points d’eau. Les plantations d’arbres vont se poursuivre. Dans un contexte très urbanisé et dense et où les sous-sols sont très encombrés, des projets pilotes en cours recherchent les meilleures solutions pour les planter. La ville travaille aussi activement à ce que le fort développement communal prévu par le plan directeur cantonal s’accompagne d’équipements publics répondant aux besoins, d’espaces publics de qualité et végétalisés, un maximum de sols perméables …

Nous avons la chance, Mesdames et Messieurs, de vivre dans une ville progressiste et visionnaire qui a su, pour paraphraser le grand historien de notre ville André Corboz, «s’inventer». La transition écologique et sociale demande de poursuivre cette invention pour assurer, dans les meilleures conditions possibles, son avenir et le bien-être de sa population.

Avant de conclure, j’aimerais encore exprimer ma profonde reconnaissance à toutes les associations et sociétés – pompiers, sauveteurs, samaritains, yodleurs, lutteurs et autres sportifs et sportives, artistes et musiciens/musiciennes – qui participent à la réussite de cette manifestation et qui contribuent quotidiennement à la vie de notre cité.

Je remercie aussi les services de l’administration qui ont porté l’organisation de cet événement et tout particulièrement le Service des affaires culturelles et de la communication ainsi que le Service de la voirie, des espaces verts et du matériel.

Enfin, avant d’entamer ensemble l’hymne national sous la direction experte de notre Musique municipale que je remercie tout particulièrement ici pour sa présence, j’aimerais encore vous souhaiter, au nom du Conseil administratif aussi, à toutes et tous une très belle Fête nationale.

Vive Carouge, Vive Genève et Vive la Suisse !